Semaine 11 : de Trojica à Vilusi

Lundi 9 juillet, nous partons assez tôt pour 14 km d’ascension. Nous savons qu’une fois dans les lacets de Kotor, nous ne trouverons plus d’habitation et que nous devons arriver en haut avant le soir. Après seulement quelques kilomètres, nous nous arrêtons à la dernière maison afin de faire le plein de la poche à eau. Nous venons de réaliser que nos gourdes ne suffiront probablement pas pour arriver jusqu’en haut. Soline se voit offrir des chips, qu’elle partagera avec plaisir avec Hugo.

Damien, me sachant fatiguée, a de nouveau pris mes sacoches avant, ce qui lui fait beaucoup de poids sur son vélo mais il n’a pas l’air de peiner. Ca grimpe régulièrement à 5% de moyenne donc ça se fait finalement assez bien, même s’il nous faudra de longues heures et de nombreuses pauses avant d’arriver en haut. Nous sommes récompensés tout le long par une vue magnifique. D’un côté sur Kotor, de l’autre sur Tivat, et plus nous montons, plus nous voyons les montagnes au loin et la mer adriatique. C’est vraiment superbe !

Ma crainte avant d’attaquer la montée, était de nous retrouver en plein soleil sans endroit de pause possible. Mais finalement, nous arrivons à trouver de l’ombre et un peu de place au bord de la route pour le pique nique. L’endroit n’est pas idéal, nous avons choisi le côté route plutôt que le côté falaise par sécurité… Et nous ne nous attardons pas.

Peu de temps après le repas, l’orage menace. Nous voyons les éclairs et les trombes d’eau tomber juste devant nous et commençons à nous tracasser un peu… En effet, nous sommes au milieu de la montagne, sans endroit où nous abriter et avons un peu peur de nous prendre un éclair sur la tête… Nous décidons donc de nous équiper de nos ponchos, sortir la bâche, en attendant le déluge… qui n’arrivera pas ! L’orage nous passe en effet à côté, tant mieux !

La fin de la montée se passe tranquillement, avec une vue de plus en plus magnifique sur toute la baie de Kotor. C’est splendide. On savoure ce moment et cette vue, méritée à la force des mollets.

Nous arrivons ensuite au premier village. Petit ravitaillement glaces et boissons fraiches au bar. Les glaces à 50 centimes, ça annonce une belle baisse des prix 🙂 Lorsque je demande un endroit où planter la tente, la gérante me dit qu’il n’y a aucun souci à se mettre juste à côté du bar, que de nombreux campeurs font ça. Nous comprenons qu’au Monténégro, il n’y a aucun problème avec le camping sauvage, ça ne dérange personne. Nous choisissons tout de même de dormir dans une location car la journée était très fatigante et nous avons besoin d’une bonne nuit de repos. Et les enfants peuvent apprécier les jeux, après 2 journées pas très sympas pour eux. Ce soir Hugo a d’ailleurs un petit coup de cafard et pense à ses copains qui lui manquent beaucoup.

Le mardi, nous repartons bien reposés en direction de Cevo. Ce soir, c’est la demi-finale France/Belgique et nous aimerions trouver une télévision pour voir le match. L’étape est longue, je n’ai de nouveau pas d’énergie… Damien et les enfants m’aident en poussant le vélo. Damien est beaucoup plus motivé que moi d’arriver à destination et est prêt à faire le trajet avec les 2 vélos s’il le faut. Pour moi, ce n’est pas facile d’accepter toute cette aide… Le fait de ne pas y arriver, de ne plus avoir de force, le tout sous l’oeil de la caméra, j’ai un peu de mal. Mais c’est comme ça… C’est sans compter sur l’extrême envie d’apprécier enfin une descente (après 3 jours de montée) que Damien se trompe de chemin par excès de confiance en oubliant les fondamentaux : « Toujours vérifier le chemin avant de descendre ». En effet, il nous aura fallu rajouter 2 petits kilomètres de remontée pour retrouver la bonne route.

Nous repérons un café, seul au milieu de nulle part, à un croisement à 9 km de Cevo. Nous essayons de savoir s’il est possible d’y dormir mais à priori, non. Au moment de partir, par dessus notre épaule, in-extremis, nous remarquons un petit panneau. Il est fait maison et indique ce qui ressemble à une maison d’hôte (picto de lit, charcuterie, raisin, pain, …) Nous sommes interpellés par le “Welcome” et “Bikers friendly” ajouté à la main au stylo, et nous demandons si c’est aussi le cas de “bikers” non motorisés… Damien le sent bien et décide de suivre son instinct, nous changeons de direction et suivons le panneau. Quelques kilomètres plus tard, nous arrivons à un embranchement et suivons un chemin de terre plein de caillasse qui descend bien jusqu’à une petite ferme. Nous voici arrivés à Dide, où nous sommes biens accueillis par Rajko et Danjela et leur famille. Ils nous montrent la location, un petit séjour (avec télévision, nous sommes sauvés !), petite cuisine, petite salle de bain et à l’étage, plusieurs lits en dortoir, que nous négocions pour 15 euros par nuit pour nous 4. Et les enfants sont ravis de voir des poules, lapins, chèvres,… Guillaume et Mario dormirons avec nous car ils n’ont pas d’autre chambre, mais il y a assez de lit pour tout le monde.

Guillaume en profite pour lancer son drone et prendre de jolies vidéos aériennes. Il repère la mamy qui rentre avec sa vache et souhaite la filmer de plus près mais c’était sans prévoir qu’elle allait dégainer son bâton pour essayer d’abattre le drône. Résultat : une hélice cassée et un bon fou rire pour tout le monde 🙂

Ils vivent pratiquement en autonomie et nous proposent de nous faire à manger, uniquement des produits faits maison, ce que nous acceptons avec plaisir. Nous passons donc une bonne soirée devant le match de foot, avec des supporters des 2 côtés 🙂 Et mangeons un bon repas bien gras, et arrosé pour les hommes…

Bien gras, ça c’est certain… Et mon organisme n’a pas réussi à le supporter… Je me réveille donc le lendemain, malade, en décidant de faire l’impasse sur le petit déjeuner. Les autres semblent en forme et contents d’attaquer par un petit déjeuner salé et tout aussi gras.

Je tiens à peine debout et je ne peux absolument rien avaler. Nous décidons donc rapidement de faire un jour de repos. Il n’est pas possible pour moi de pédaler de toute façon. Je passerai toute la journée au lit à dormir, contente d’avoir un lit pour me reposer… Décidément, dur dur de me montrer encore plus faible devant la caméra.

Damien de son côté, gérera seul les enfants, l’école, le tournage, les préparatifs de la suite de l’itinéraire, en croisant les doigts pour que je sois capable de repartir le lendemain.

Jeudi 12 juillet, je me réveille en meilleure forme. S’il n’y avait pas eu le tournage, j’aurais probablement prolongé d’une journée supplémentaire mais là, je préfère reprendre la route. Nous repartons avec un portefeuille plus léger, la note s’étant allourdie des différents repas et boissons mais contents d’avoir passé ces moments en leur compagnie.

Nous nous arrangeons avec Rajko pour qu’il charge les vélos dans sa remorque et nous remonter sur la route. Les 2 km de chemin de terre sur les cailloux risquent d’être très longs à remonter sur le vélo. Il accepte avec plaisir et nous voilà bien contents d’éviter cette difficulté.

Nous poursuivons ensuite la petite route de montagne sur laquelle nous sommes. Nous attendons avec impatience le premier village afin de faire des provisions. Mais les seuls villages que nous croisons sont absolument déserts, les maisons sont vides, sales, cassées,.. probablement les traces de la guerre. L’ambiance est très particulière, ça fait un peu froid dans le dos de traverser ces villages fantômes. Nous trouvons finalement une seule maison habitée qui, heureusement, accepte de nous donner de l’eau. Nous comprenons maintenant qu’ici, il faut partir avec une bonne réserve. Ils offrent aussi des jus aux enfants, des bananes et Damien boit le schnaps avec eux. Ben oui, ça ne se refuse pas… Les gens sont vraiment accueillants ici. Soline jouera avec la petite fille et ils nous laisseront cuisiner devant chez eux. Heureusement que nous avions quelques réserves de pâtes.

Plus nous avançons sur cette route, plus nous comprenons que nous sommes vraiment au milieu de nulle part. Nous n’avons plus d’argent liquide, et les réserves en nourriture ont bien diminué. Nous devons trouver un village aujourd’hui. Nous décidons donc de changer de route et nous diriger vers Grahovo, ce qui fait encore une belle étape. Nous visions les routes secondaires pour être tranquilles (là, c’est clair que c’était idyllique) mais nous n’avions pas pensé que nous serions aussi reculés.

C’est sur cette route, au milieu de nulle part, que nous fêtons nos 2000 kilomètres ! Ca commence à compter ! Nous sommes fiers de nous et réalisons tout ce que nous avons déjà parcouru 🙂

Guillaume me propose ensuite de prendre un peu mon vélo, il me voit fatiguée et se doute que j’aurai du mal à pédaler plus longtemps. J’accepte avec plaisir, et poursuit la journée dans la voiture, à côté de Mario, à parler anglais. Ca permet à Guillaume de voir encore plus de l’intérieur ce que nous vivons et prendre en compte la réalité du poids des vélos. Et ça me fait un bon répit dans cette semaine, où j’avais à certains moments envie de jeter mon vélo.

Nous arrivons enfin à Grahovo, où nous espérons faire le plein de nourriture et un retrait d’argent. Et là, nous prenons vraiment conscience que nous sommes dans un endroit très reculé. Un distributeur ? A Niksic, 50km… Un supermarché qui prend la carte ? Niksic, 50km… Oups, on n’est pas bien là… Heureusement, super Guillaume nous dépanne en nous avançant de l’argent. Nous allons pouvoir faire de courses et tenir jusqu’à Niksic.

Ici, il n’y a aucun camping. On nous indique un endroit près du lac de Grahovo pour camper. Malheureusement nous arrivons par le mauvais côté et revenir au bon endroit implique un trop gros détour… Les gens ont l’air sympa par ici et nous repérons un “terrain de foot” bien plat. Il s’agit plutôt d’un champ fauché avec une seule cage de foot en bois fait maison, mais lorsque nous demandons si nous pouvons nous installer, on nous répond qu’il n’y a pas de soucis. A peine la tente installée, qu’une demi équipe de foot arrive sur le terrain pour jouer dans la pénombre. Mais ça n’a pas l’air de les déranger que nous soyons là…

Nous passons une dernière soirée avec Guillaume et Mario, ce qui signifie la fin de ce tournage intense.

Le lendemain matin, le réveil est un peu difficile. J’ai très peu dormi, comme toujours en bivouac “sauvage” car, même s’il n’y a aucun danger, mon cerveau reste en alerte et le moindre bruit me réveille…

Guillaume et Mario nous rejoignent pour prendre le café avant de nous dire au revoir. Nous replions ensuite très lentement nos affaires et prenons la route en direction de Niksic. Nous savons que nous n’y arriverons pas aujourd’hui mais souhaitons nous en rapprocher. Les premiers kilomètres sont en descente mais nous avons ensuite plusieurs kilomètres de côte assez raide. La fatigue se fait sentir de suite, je n’avance pas, Damien m’aide, bref… du déjà vu ! Mais sans la pression de la caméra cette fois… Nous faisons la pause pique nique en plein milieu de la montée, sous un pauvre petit arbre qui nous donne de l’ombre et repartons rapidement avec un peu plus d’énergie. Surtout que nous avons profité de la pause pour réserver une petite maison sur booking pour cette nuit. 30 euros pour 90 m2 et un endroit au calme pour nous reposer et, critère important, c’était la plus proche de notre position.

Nous arrivons enfin sur la route principale et, à la fin de la montée, nous voyons des gens et de nombreuses voitures et nous arrêtons pour demander de l’eau. Nous tombons sur une famille qui parle très bien anglais. Ils nous proposent d’abord des gâteaux pour les enfants, nous invitent ensuite à boire un coup à table (il propose du café, jus de fruit et… du schnaps bien sur), et nous sommes rapidement invités à manger et rester dormir le soir. Ils nous font bien comprendre qu’une invitation ne se refuse pas et nous avons rapidement les assiettes devant nous, à 15 heures, pour un second repas 🙂 Ils nous explique que le 13 juillet, ils fêtent l’indépendance du Monténégro et que la famille se réunit pour le week-end. Nous sommes donc au milieu du repas de famille de ces personnes si gentilles et généreuses. Nous partirons tout de même après le repas pour rejoindre la location que nous avions réservé. Très heureux d’avoir passé un moment avec cette famille.

La petite maison se trouve à Vilusi, au bout d’un chemin de terre et présente tout le confort d’une maison des année 70 en France. De la cuisine à la télévision cathodique, nous avons l’impression de faire un retour en arrière au Monténégro, mais c’est sur que nous allons bien nous plaire ici. Nous arrivons en plus à négocier un paiement par Paypal avec le propriétaire (même sur Booking, le paiement se fait en espèces ici), et de rester 2 nuits supplémentaires, pour 80 euros au total. Youpie ! Nous pourrons repartir bien reposés lundi.

Samedi, nous ne faisons rien ! Les enfants profitent de l’extérieur, nous faisons une petite course à la mini supérette du village et nous prenons notre temps.

A 18 heures, nous réalisons notre premier live Facebook, bien contents de voir vos petits messages et vos questions.

Dimanche, nous passons une deuxième journée tout aussi tranquille. Damien en profite pour faire une bonne révision des vélos, en appliquant à la lettre tous les conseils de notre super vendeur de vélo, Frédéric de Cévènàvélo. Heureusement car il touche à peine à mon vélo qu’une visse tombe ! Ils avaient besoin d’un bon resserage, gonflage de pneus, nettoyage de chaîne, dévoilage de roue,…

Nous regardons ensuite la finale sur notre petite télé. Bravo les bleus 🙂 

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